quignard

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Invité

quignard

Message par Invité »

Bonne année à tous
Après une courte disparition me revoilà avec une question de grammaire.

Je lis dans Pascal Quignard ceci:


Le quatrième homme qui éprouva la joie de retrouver le paradis est le larron auquel Jésus sur la croix l'avertit qu'il allait le rejoindre...

(Les Paradisiaques Chapitre LXV
Le bon laboureur)

Cette phrase a du mal à passer. Elle me semble fautive.
Cela m'étonne beaucoup de la part d'un auteur dont la correction grammaticale est rarement prise à défaut.

Qu'en pensez-vous?
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Anne
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Message par Anne »

Je partage votre avis : on avertit quelqu'un et non à quelqu'un.
J'aurais remplacé auquel par que et supprimé le l'.
C'est vrai que c'est étonnant de trouver une telle faute chez un auteur respectable. N'est-ce pas une faute de l'éditeur ?
Ou alors c'est nous qui sommes dans l'erreur, et on va nous donner une preuve que cette tournure est correcte...
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Perkele
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Message par Perkele »

Rien dans mon modeste savoir ni dans ma maigre bibliothèque grammaticale ne vient à l'encontre de votre étonnement. Attendons Jacques ou Marco.

Sinon une phrase d'Henri-Frédéric Amiel (1821-1881) :

"C'est une position bizarre, et qui devient cruelle quand la douleur m'oblige à rentrer dans mon petit rôle, auquel elle me lie authentiquement et m'avertit que je m'émancipe trop en me croyant, après mes causeries avec le poète, dispensé de reprendre mon modeste emploi de valet dans la pièce. - Shakespeare a dû éprouver souvent ce sentiment, et Hamlet, je crois, doit l'exprimer quelque part."
Il faut faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux.
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JR
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Message par JR »

Anne a écrit :Je partage votre avis : on avertit quelqu'un et non à quelqu'un.
J'ai souvent remarqué cette particularité chez des "pieds noirs".
Mais il ne semble pas que Pascal Quignard le soit.
Contamination ?
L’ignorance est mère de tous les maux.
François Rabelais
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Jacques
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Message par Jacques »

Le verbe avertir est transitif direct, on avertit quelqu'un. Il commande donc un COD : que Jésus avertit. Auquel veut dire à qui et détermine un COI. La faute est avérée.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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Perkele
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Message par Perkele »

Amiel est donc fautif aussi ?
Il faut faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux.
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Jacques
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Message par Jacques »

Non, nous avons deux verbes : La douleur m'oblige à... et m'avertit que... La phrase est d'une construction qui appelle la réflexion et l'analyse, mais elle est syntaxiquement correcte. Il faut une virgule après authentiquement, et tout s'éclaire.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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Perkele
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Message par Perkele »

Mais elle n'y est pas.

On comprend donc : "la douleur m'oblige à rentrer dans mon petit rôle auquel elle m'avertit que je m'émancipe trop."
Il faut faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux.
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Jacques
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Message par Jacques »

Perkele a écrit :Mais elle n'y est pas.

On comprend donc : "la douleur m'oblige à rentrer dans mon petit rôle auquel elle m'avertit que je m'émancipe trop."
CQFD. J'ai bien vu qu'elle fait défaut. C'est une virgule facultative, mais il eût été souhaitable qu'elle y fût, afin que la phrase y gagnât en clarté.
Il faut savoir placer les points sur les I et les virgules après les authentiquement.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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Message par Invité »

Dans la phrase citée par Perkele, on peut en effet mettre entre deux virgules le segment "auquel elle me lie authentiquement " pour l'isoler et le neutraliser;

Ainsi on s'évite la tournure fautive : "mon petit rôle auquel elle m'avertit que je m'émancipe trop.".

Pour Qugnard, il n'y a pas de possible virgule providentielle qui, mise au bon endroit, sauverait la mise et la phrase. J'ai donc bien peur que Jacques ait raison et qu'il faille en convenir: il ya faute.

Mais que font les correcteurs????
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Jacques
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Message par Jacques »

Correcteur est un métier qui se perd. On se passe dans certaines publications de ses services. Et ceux qui exercent encore ne sont pas d'une compétence à toute épreuve. Pire : dans les articles que je publie, ils se permettent de me corriger des choses quoi ne doivent pas l'être. Quand j'applique les recommandations orthographiques de 1990 dans les textes que je remets à l'imprimeur, on me les modifie. On ne me met pas les accents sur les majuscules, et on m'ajoute des ponctuations fautives. Je me suis fâché et ai envoyé une lettre de semonce au responsable. Je lui ai rappelé que je n'écris pas des recettes de cuisine mais des articles sur la langue française qui doivent être irréprochables, en lui précisant que j'interdis formellement toute modification de mon orthographe, de ma typographie ou de ma ponctuation.
Dernière modification par Jacques le mer. 20 janv. 2010, 21:44, modifié 1 fois.
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Marco
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Message par Marco »

C’est comme cela partout : j’ai écrit quelques articles en italien, qui ont été publiés dans des revues, et on m’a « corrigé » ce qu’il ne fallait pas corriger, car ces correcteurs ne connaissent pas le bon usage. J’étais furieux.
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Perkele
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Message par Perkele »

Il m'est arrivé d'avoir subit une correction "premier jet" par un correcteur automatique qui a introduit dans mon texte des fautes grossière comme "employer du personnel à l'envie". :evil:

Puis, dans un texte où j'expliquais plus subtilement que l'accord du participe passé suivait la même règle avec l'auxiliaire avoir suivi d'un infinitif (la pianiste que j'ai entendue jouer ; la sonate que j'ai entendu jouer) et un verbe pronominal suivi d'un infinitif (elle s’est sentie mourir ; elle s’est senti piquer par un moustique), on m'a rajouté un E au dernier senti faisant précisément la faute que je disais de ne pas commettre. :twisted:
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Marco
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Message par Marco »

Oui, les correcteurs automatiques ont encore du chemin à faire. Et les correcteurs humains aussi !
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Jacques
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Message par Jacques »

Je constate que nous sommes tous les trois dans la même situation. Écrire juste et se voir infliger des rectifications fautives, c'est très agaçant. Je ne fais aucune confiance aux correcteurs automatiques. Quant aux correcteurs humains, le chemin, ils le font à reculons.
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